Incontournables dans tout process de commercialisation de produits, les emballages constituent une ligne de coûts non négligeable pour les entreprises, en particulier dans l’agroalimentaire, l’industrie cosmétique / pharmaceutique ou la logistique. Dans ce zoom Tips d’experts, nous nous intéressons plus particulièrement aux emballages en carton : Rémi Postic, consultant ERA pour la France, nous fournit ici des clés pour comprendre ce marché et identifier les leviers à activer par votre entreprise pour gérer intelligemment ces dépenses.
1. Comprendre les drivers de coûts
Acheter ses emballages carton au juste prix nécessite avant tout de comprendre la chaîne de production de la principale matière avec laquelle on les fabrique : le papier kraft. Le kraft est obtenu à partir de bois venant d’Asie : ce bois est transformé en pâte à papier qui sera acheminée par bateau vers l’Europe afin d’en faire du papier kraft, qui se présentera sous forme de bobines. Ces bobines sont ensuite transportées en camion vers des usines locales de finition qui fabriquent les cartons prêts à l’emploi.
Qu’est-ce qui génère le plus de coûts dans cette chaîne ? Le prix du pétrole pour le transport par bateau et camion. Le coût du gaz pour la partie transformation en bobines de papier.
Il est donc nécessaire de suivre 3 indices clés :
- l’indice du test liner (qui correspond à l’étape de transformation en pâte à papier),
- l’indice insee du carton, qui prend en compte tous les drivers de coûts sur l’ensemble de la chaîne,
- l’indice des prix de l’énergie.
Lorsque nous intervenons sur les coûts « packaging carton » de nos clients chez ERA Group, nous commençons par l’analyse de l’indice des matières sur les 3 dernières années.
2. Quelle corrélation entre indice et prix fournisseur ?
C’est là que le sujet se corse : en effet, l’évolution des prix chez les fournisseurs ne suit pas forcément les courbes de variation de l’indice analysé. Certains fournisseurs vont méthodiquement indexer leurs prix unitaires sur l’évolution des indices, à la baisse… comme à la hausse. Tandis que d’autres observent un décalage : en cas de hausse de l’indice, l’entreprise acheteuse va bien sûr être satisfaite de ne pas s’en voir répercuter le prix mais en cas de baisse - notamment substantielle - elle peut au final se retrouver perdante.
Prenons le cas d’un de nos clients dans l’industrie cosmétique générant 400 millions d’euros de chiffre d’affaires : il consacre 11 millions d’euros pour le packaging, dont 4 uniquement pour le carton. Au final, le fait que certains de ses fournisseurs n’aient pas appliqué les baisses de l’indice en 2023 a représenté pour lui un manque à gagner de plusieurs centaines de milliers d’euros.
Cette corrélation est en fait complexe, car elle prend en compte des critères de qualité dans les emballages livrés et dépend aussi des règles de contractualisation fixées (ou non) avec le fournisseur.
C’est pourquoi notre deuxième pan d’analyse stratégique chez ERA s’attache à l’évolution des tarifs fournisseurs sur les 3 dernières années, pour voir si, sur la durée, les variations des tarifs fournisseurs s’équilibrent avec celles des indices marché.
3. Se repérer dans un univers complexe
Ce deuxième pan d’analyse peut vite représenter un casse-tête chinois pour n’importe quel acheteur, aussi performant soit-il. Reprenons le cas de notre client dans l’industrie cosmétique :
Juste pour le carton, il n’a pas moins d’une quinzaine de catégories à étudier, soit plus de 1000 références articles.
Ensuite, il faut prendre en compte une dizaine de fournisseurs.
Enfin, on observe une non-homogénéité entre les fournisseurs, notamment concernant les grilles de tarifs : ils ne les actualisent pas tous au même moment, ou les infos qui y figurent divergent, ou sont présentées tout à fait différemment. En définitive, il est impossible de faire simplement une comparaison entre des lignes de prix. Sans compter les cotations spéciales qui interviennent dans ce secteur…
Passer des commandes devient in fine extrêmement complexe pour qui veut respecter une logique approfondie d’optimisation des prix… surtout avec le degré de réactivité demandé par la production à l’autre bout de la chaîne !
Cet empilement de contraintes engendre des erreurs manuelles, et nous observons qu’il est rare que les entreprises chez qui nous intervenons paient le prix véritablement fixé dans la grille.
En conclusion
Vous comprenez sans doute mieux maintenant pourquoi de nombreuses entreprises préfèrent faire appel aux expertises ERA que de confier ce travail de fourmi à leurs employés en interne. Aucun collaborateur n’aura pour mission de passer un temps plein à éplucher les indices et conditions fournisseurs pour identifier le perfect deal, offrant le meilleur équilibre entre qualité et dépense maîtrisée… même si le jeu en vaut la chandelle du point de vue gain pour l’entreprise.
C’est aussi notre préconisation chez ERA : le plus efficient pour une entreprise est que chaque membre de son équipe se concentre sur son ‘core business’, en se demandant « où est-ce que je suis indispensable ? »
Définir une véritable stratégie des achats est indispensable ; développer ses relations avec ses fournisseurs, y compris ceux de classe C, l’est tout autant. C’est là que vos équipes apporteront le maximum de valeur najoutée, pour mieux emmener votre entreprise vers le niveau de développement et d’ambitions auquel elle peut prétendre.
Quelles tendances 2024 pour le carton ?
Les évolutions actuelles du marché du carton démontrent la forte corrélation avec les prix de l’énergie. Nous observons en ce premier trimestre un marché descendant, qui se détend suite à la crise du gaz. C’est donc le bon moment pour ramener ses dépenses de cartonnage à un niveau raisonnable tout en sécurisant ses fournisseurs.
A noter cependant : l’explosion du commerce en ligne - et des quantités d’emballages carton nécessaires en conséquence - est venue chambouler ce marché. Il est ainsi estimé qu’Amazon représentait plus de 7% de l’ensemble des approvisionnements de carton ondulé au Royaume-Uni fin 2022. D’autre part, les évolutions réglementaires européennes imposent désormais aux entreprises d’augmenter le taux de réutilisation et recyclage des emballages. Ainsi, en France, la loi AGEC introduit la Responsabilité Elargie du Producteur (REP) qui induit la création de nouvelles filières de réemploi et recyclage concernant l’ensemble des emballages professionnels à compter du 1er janvier 2025.